Définition de MALIN, MALIGNE

DÉFINITIONS - REMARQUE - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE -

Prononciation : ma-lin, li-gn' ; au masculin, la finale in devant son substantif commençant par une voyelle garde le

DÉFINITIONS

1
Qui a de la malignité, qui se plaît au mal.
Nous qui sommes si indiscrets et si malins dans nos paroles
de François de Salignac de La Mothe FÉNELON dans t. XVII, p. 218
Nature : Substantivement.
T'ai-je peint la maligne aux yeux faux, au coeur noir ?
de Nicolas BOILEAU-DESPRÉAUX dans Sat. X
L'esprit malin, le malin esprit, ou, absolument, le malin, le diable.
Tout le monde est sous l'empire du malin
de Isaac Louis Lemaistre de SACY dans Bible, St. Jean, 1re épît. V, 19
Je crains, dit-il, les ruses du malin
de Jean de LA FONTAINE dans Herm.
Ces visites, ces bals, ces conversations Sont du malin esprit toutes inventions
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Tart. I, 1
Ne faut-il pas être possédé du malin pour s'exterminer au lieu de couler doucement sa vie ?
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Lett. en vers et en prose, 78
L'enfant malin, l'Amour.
L'enfant malin et trompeur ne caressait que pour trahir
de François de Salignac de La Mothe FÉNELON dans Tél. VII
En ce sens, il se dit aussi des choses. Interprétation maligne.
Votre douceur maligne autant qu'ingénieuse Pour rendre de mon rang la hauteur odieuse
de QUINAULT dans Pausan. I, 4
Ils semaient adroitement leurs accusations malignes comme des plaintes de l'injustice de leur ami
de Jean-Jacques ROUSSEAU dans Confess. X
Maligne joie, la joie qu'on a du mal d'autrui et qu'on voudrait cacher.
Mon coeur en prend par force une maligne joie
de Pierre CORNEILLE dans Poly. III, 5
Un Français qui était avec moi m'avoua qu'il sentait une joie maligne de voir que les Anglais, qui nous reprochent si hautement notre servitude, étaient esclaves aussi bien que nous [il s'agit de la presse des matelots]
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Mél. litt. à M***.
Malin vouloir, intention maligne, intention de nuire.
Il a un malin vouloir, il a du malin vouloir contre moi.... Ce doucet est un chat Qui, sous son minois hypocrite, Contre toute ta parenté, D'un malin vouloir est porté
de Jean de LA FONTAINE dans Fabl. VI, 5
2
Qui se plaît à dire ou à faire de petites méchancetés pour se divertir. Un esprit malin et un bon coeur.
D'un trait de ce poëme [la satire] en bons mots si fertile, Le Français, né malin, forma le vaudeville
de Nicolas BOILEAU-DESPRÉAUX dans Art p. II
Je ne vis de mes jours plus maligne femelle
de Philippe Néricault DESTOUCHES dans Irrésolu, IV, 4
Voilà tout ce que je peux répondre, moi malingre et affaibli d'une fluxion sur les yeux, au plus malin des rois et au plus aimable des hommes, qui me fait sans cesse des balafres et qui crie qu'il est égratigné
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Lett. roi de Prusse, juin 1759
Je suis obligé en conscience de vous dire que je ne suis pas né plus malin que vous, et que dans le fond je suis bon homme
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Lett. l'abbé Trublet, 27 avr. 1761
Elle passait pour maligne ; et, dans une aussi grande dame, cette réputation me faisait trembler
de Jean-Jacques ROUSSEAU dans Conf. X
Il se dit aussi des choses. Un oeil malin. Un regard malin. De malins couplets.
Souvent j'habille en vers une maligne prose ; C'est par là que je vaux, si je vaux quelque chose
de Nicolas BOILEAU-DESPRÉAUX dans Sat. VII
Quoiqu'il fût impossible D'avoir l'air plus malin
de Pierre Jean de BÉRANGER dans De prof.
3
Fin, rusé, en parlant des personnes. Il est trop malin pour se laisser attraper.
Nature : Substantivement. C'est un malin, on ne l'attrapera pas facilement.
Ma prophétie a été accomplie encore plutôt que je ne croyais, en dépit des malins qui niaient que je connusse l'avenir
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Lett. en vers et en prose, 110
4
Qui a quelque qualité mauvaise, nuisible.
Maligne influence
de François L'Hermite, sieur du Soliers, dit TRISTAN L'HERMITE dans M. de Chrispe. III, 1
Une vapeur maligne en ma tête est montée
de François L'Hermite, sieur du Soliers, dit TRISTAN L'HERMITE dans ib. V, 4
Telles sont les malignes qualités de la volonté humaine
de Louis BOURDALOUE dans Pensées, t. II, p. 483
Soit que l'intempérie des saisons eût laissé dans les airs quelque maligne impression....
de Esprit FLÉCHIER dans Duc de Mont.
C'est par là qu'un auteur que presse l'indigence Peut des astres malins corriger l'influence
de Nicolas BOILEAU-DESPRÉAUX dans Sat. I
Il se dit des maladies qui présentent le caractère de la malignité. Pustule maligne.
Ulcère malin, ulcère de mauvaise nature et qui tend incessamment à faire des progrès.
Fièvre maligne, ancien nom des fièvres graves, et qui, dans le langage actuel de la médecine, n'a plus de sens déterminé.

REMARQUE

1
La Fontaine a dit maline au singulier ; c'est un archaïsme de prononciation : Elle avait évité la perfide machine, Lorsque, se rencontrant sous la main de l'oiseau, Elle sent son ongle maline, Fabl. VI, 6. On remarquera aussi ongle au féminin. En Normandie et dans d'autres provinces, le peuple prononce maline.

HISTORIQUE

1
XIIIe s.
Ou se Diex par tes visions Envoie revelacions, Ou li malignes esperiz, Por metre les gens en periz
dans la Rose, 18711
2
XVe s.
Sur cela fondant ma raison, Pour guarir une soif maline, J'ai recours au bon vin comme à ma medecine
de BASSEL. dans IV
3
XVIe s.
Ulceres malignes
de Ambroise PARÉ dans XI, 12

ÉTYMOLOGIE

1
Provenç. maligne ; espagn. et ital. maligno ; du lat. malignus, dérivé de malus, méchant. Le wallon dit malignant, qui est le participe présent d'un ancien verbe maligner, d'où l'anglais malignant.